La Réforme des REP en dix points

1 – ZEP ou REP ?

En 1981, sont créées les ZEP : Zones d’Education Prioritaire qui visent à corriger l’inégalité sociale, par des moyens supplémentaires accordés aux établissements scolaires situés dans les zones où le taux d’échec scolaire est le plus élevé.
A la fin des années 1990, ces ZEP deviennent des REP : Réseaux d’Education Prioritaire. Ils mettent en relation les écoles élémentaires et maternelles situées dans le secteur de recrutement d’un collège dit « sensible » ; là encore des moyens supplémentaires (en personnels enseignants ou non, en heures de cours, en options…) sont attribués pour tous les établissements du réseau.
En 2006, la plupart des REP deviennent des « RRS » : Réseaux de Réussite Scolaire. Les autres, dans lesquels les difficultés sont toujours particulièrement importantes, deviennent des RAR (Réseaux Ambition Réussite) et voient leurs moyens accrus.
Depuis, des dispositifs nommés « ECLAIR », puis « REP + » sont venus remplacer les RAR.

2 – Aujourd’hui, c’est quoi le REP ?

En France, 20 % des élèves sont actuellement scolarisés dans une école ou un collège REP ou REP +.
Mais ces dispositifs d' »éducation prioritaires » ne représentent en tout que 2% du budget total de l’Education Nationale

En REP, les établissements doivent bénéficier de classes à effectifs limités, mais aussi d’une priorité à la scolarisation des enfants de moins de trois ans, du dispositif « plus de maîtres que de classes »… — et en collège, des personnels non enseignants plus nombreux, des heures de cours attribuées pour des options comme les langues, le sport, les Arts…
En REP +, s’ajoutent à cela des temps de concertation et de formation spécifiques, des primes plus importantes pour stabiliser les équipes enseignantes…

Cependant, depuis quelques années, mêmes ces moyens ne sont plus systématiquement assurés aux établissements de l’éducation prioritaire, même lorsque la situation socio-économique de leur secteur n’a pas changée…

L’Académie de Créteil est celle qui compte le plus d’établissements REP et REP +.
Mais les moyens matériel et humains se réduisent de plus en plus, les enseignants ne sont plus assez nombreux, et également les personnels d’encadrement dans les collèges, les infirmières, assistantes sociales, maîtres spécialisés…

En fait, dans notre Académie, les établissements d’éducation prioritaire ont tout juste les conditions minimum d’une scolarité correcte pour nos enfants

3 – Pourquoi réformer les REP ?

Le Ministère de l’Education Nationale a commencé à parler de « réforme de l’éducation prioritaire » il y a presque un an… mais sans que le contenu de cette réforme ne soit dévoilé — et au compte-goutte — avant septembre 2014.
Le Réseau d’Education Prioritaire serait, selon le Ministère, inefficace, dépassé, il s’appliquerait à des établissements qui n’en auraient plus besoin, alors que d’autres nécessiteraient ce dispositif.
Et sans doute (même si ce n’est pas l’explication officielle) qu’en ces temps de restrictions budgétaires, il est jugé trop coûteux…

4 – Que sait-on aujourd’hui sur le contenu de la réforme ?

La réforme de l’éducation prioritaire a été présentée en janvier 2014 par Vincent Peillon, alors ministre de l’éducation nationale ; elle comprend 14 mesures-clés :

– La scolarisation des moins de 3 ans dans chaque réseau
– « Plus de maîtres que de classes » dans chaque école
– Un accompagnement continu jusqu’à 16 h 30 pour les élèves de sixième
– L’extension du dispositif D’Col dans tous les collèges de l’éducation prioritaire
– Développer l’ambition et la curiosité des élèves pour les aider à construire leur parcours
– Le développement d’internats de proximité pour les collégiens
– Du temps dégagé pour les enseignants, pour travailler ensemble et permettre le suivi des élèves dans les réseaux les plus difficiles
– Un grand plan de formation continue des enseignants et d’accompagnement (notamment pour les nouveaux enseignants)
– Une rémunération plus attractive et un parcours en éducation prioritaire qui sera valorisé dans la carrière, pour stabiliser les équipes
– Un cadre propice aux apprentissages avec des projets de réseaux et une évolution des pratiques pédagogiques. Les moyens alloués sur cette base seront garantis pour une durée de 4 ans.
– Un fonds académique pour financer des actions pédagogiques et l’animation des réseaux
– Un accueil des parents, chaque matin, pour mieux les associer à la vie de l’école
– 500 assistants de prévention et de sécurité supplémentaires pour améliorer le climat scolaire
– Un infirmier scolaire supplémentaire dédié aux écoles et un assistant social, dans les réseaux les plus difficiles

Mais tout cela se ferait à moyens financiers constants et sans mettre en place des mesures incitatives fortes, qui permettraient, par exemple, aux jeunes diplômés de vouloir enseigner en Seine St Denis ou de s’y installer comme « médecins scolaires »…

Et les premiers « indices » qui filtrent sont inquiétants :

Par exemple, au Conseil d’Administration du collège Marais de Villiers le 05 décembre, qui devrait passer en REP : même la principale ne savait pas ce que cela signifiait en terme de moyens…

En Ile-de-France, les Directeurs Académiques refusent désormais le terme de « seuil » pour l’effectif limité d’élèves par classe. Ils lui préfèrent désormais celui de “repère”.

Dit autrement : face à la hausse des effectifs dans toute la Région (notamment avec la construction de nouveaux logements sans que les Communes aient les moyens de construire de nouvelles écoles) et face à la pénurie d’enseignants, il faut prévoir (se résigner ?) à une hausse générale des effectifs par classe dans l’éducation prioritaire — et encore plus en dehors ?

Enfin, un dispositif nommé : « mobilité-facilité » serait mis en place pour tous les enseignants de REP : ceux-ci pourraient muter dans un autre établissement REP (mais situé dans une autre commune par exemple) plus facilement, et en gardant leur prime…. Ce dispositif conduirait surtout à casser les équipes stables de travail qui ont mis des années à se construire.

5 – Combien de REP et pour combien de temps ?

En septembre 2015, la France devrait compter 731 REP et 350 REP+.
Le nombre total de réseaux d’éducation prioritaire reste inchangé au final, 1081.

Pour l’Académie de Créteil, il s’agirait de 96 REP, auxquels s’ajouteraient 35 REP +.

A Montreuil, actuellement, les collèges Politzer et Paul Eluard étaient classés en REP, et Lenain de Tillemont en REP +
La nouvelle carte pour septembre 2015 serait : tous les collèges de Montreuil seraient en REP, sauf Jean Jaurès, M. Berthelot et Paul Eluard.

Cette nouvelle carte de la géographie prioritaire sera revue tous les quatre ans.

6 – Quels sont les critères pour entrer dans un REP ?

Les collèges et écoles primaires seront inclus dans les REP ou REP+ en fonction de 4 critères, qui constitueraient « l’indice social » de l’établissement :

• Pourcentage d’élèves issus des catégories sociales les plus défavorisées
• Pourcentage d’élèves issus de zones urbaines sensibles
• Pourcentage d’élèves en retard à l’entrée en 6e
• Taux de boursiers

Mais :

– L’indicateur par catégories socio-professionnelles (CSP) est fondé sur les déclarations des familles. Il n’a donc aucune valeur statistique. Beaucoup de parents ne les remplissent pas, ou les remplissent « au hasard »… Et ces catégories ne disent rien de l’emploi réel, du chômage éventuel, des revenus… des familles !

De plus, si un établissement de Seine St Denis par exemple compte 30% de CSP « favorisées » et 45% de « défavorisées », il sortira du REP en raison d’un trop fort pourcentage de familles « favorisées ». Or, pour le même ratio, cet établissement resterait dans le REP s’il se trouvait en Seine-et-Marne…
En effet, les « seuils » varient d’un département à l’autre, et même d’un secteur à l’autre…

– Les Zones Urbaines Sensibles sont, là encore,
 définies différemment en raison des régions, départements, zones rurales ou urbaines…
A Montreuil, sont définies comme ZUS les secteurs des Grands Pêchers, Bel Air, Montreau, Ruffin, La Noue.
Mais le secteur de la Boissière n’est pas ZUS, alors que celui sur Noisy-le-Sec, l’est… (voir : http://sig.ville.gouv.fr/Atlas/ZUS/)

– Le taux de redoublants à l’entrée en 6e
Les moyennes nationales de redoublants cachent de très grandes disparités locales. Certaines écoles font redoubler, d’autres pas du tout. Dans les écoles des quartiers sensibles, justement parce qu’elles bénéficient de moyens supplémentaires, c’est à dire d’enseignants plus nombreux, à niveau égal, on fait moins redoubler les élèves. L’aide personnalisée, le travail en petits groupes permettent d’éviter ce redoublement.

– Le taux de boursiers
Le chiffre peut grandement varier, en fonction de l’établissement, de la présence ou non d’une assistante sociale à temps plein… De nombreuses familles ont besoin d’aide et de conseils au moment d’entamer des démarches administratives. Or si cette aide ne vient pas, faute de personnels impliqués et en nombre suffisant, les demandes de bourses ne sont pas faites et ne sont évidemment pas versées aux familles alors même qu’elles le devraient. Bon nombre d’assistantes sociales constituent d’ailleurs les dossiers pour les familles en difficulté sans attendre que celles-ci ne les réclament.

En plus du peu de fiabilité de ces 4 indices, on peut aussi se demander pourquoi le ministère garde secret les chiffres obtenus à l’aide de leur croisement…

7 – Si un collège est REP, les écoles primaires du secteur resteront aussi en REP ?

Non.

Jusqu’à présent, les écoles maternelles et élémentaires du secteur d’un collège suivaient le même classement que lui.

Ce ne sera plus le cas en 2015 : un collège pourra être « REP », les écoles de son secteur ne le seront plus obligatoirement.
Le cas de chaque école doit être examiné au cas par cas… sur la base des 4 critères présentés ci-dessus, mais calculés sur des chiffres liés au collège, et ne prennant pas en compte les données relevant des écoles maternelles et primaires qui alimentent le collège.

Il y aura donc désormais des  » îlots prioritaires  » et plus de réseau prioritaire.

8 – Et si une école ou un collège sort du REP ?

Pour les établissements qui sortiraient du REP, des « conventions académiques de priorité éducative » (CAPE), pourraient être mises en place pour, en principe, « garantir les moyens pour trois ans ». Et un « nouveau mode de calcul, permettant de répartir les moyens proportionnellement à la difficulté sociale », lui aussi divulgué avant Noël, indique le ministère.

Mais pour le moment, personne n’a vu ces « CAPE » et le Ministère n’explique pas ce qu’elles contiendraient réellement…

9 – Quand connaîtra-t-on les établissements REP et REP+ en 2015 ?

Sur les établissements concernés (ceux qui entreraient en REP, ceux qui en sortiraient…), la communication du Ministère se fait département par département, sûrement afin d’éviter une grande colère généralisée.
Désormais, les collèges connaissent leur sort — mais l’annonce officielle par le Ministère serait faite le 15 décembre.
Une vingtaine de collèges sortant du REP sont désormais en lutte dans les 3 départements que regroupe notre Académie (77, 93 et 94.)

Mais les écoles primaires, elles, ne le sauront que… plus tard !
Pour l’Académie de Créteil, ce sera le 15, ou le 17 décembre, pour les REP + en tout cas, voire après (pendant ?) les vacances…

10 – Quels réactions des établissements à ces annonces ?

Au fur et à mesure que les établissements, jusqu’alors classés REP, découvrent qu’ils ne le seront plus en septembre 2015, la colère explose !
Pas uniquement à Montreuil ou en Seine-St-Denis, mais partout en France !

Vous pouvez voir (et signer) la pétition nationale à l’adresse suivante :
http://www.petitions24.net/contre_le_demantelement_de_leducation_prioritaire

une page Facebook est née avec la pétition nationale : https://www.facebook.com/pages/Contre-le-démantèlement-de-léducation-prioritaire/315708148621145?pnref=story